Des voix s’élèvent de plus en plus pour contester l’incarcération et plaider en faveur de la mise en liberté du capitaine Dadis Camara à cause de son statut d’ancien président de la Guinée. Face à cette actualité qui fait couler beaucoup d’encre et de salive, l’avocat Maître Mohamed Traoré apporte des précisions.
L’ancien bâtonnier s’adresse à ceux qui pensent que le capitaine Moussa Dadis Camara, malgré sa volonté d’apporter sa part de vérité dans le procès des massacres du 28 septembre, devrait être mis en résidence surveillée en raison de son statut d’ancien président.
« Cet argument risque d’être inaudible pour la bonne et simple raison que dans le contexte actuel, il n’existe pas un statut pénal spécial pour un ancien chef d’État. Dans tous les cas, il y a des anciens chefs d’État comme Luiz Inacio Lula da Silva (Brésil) et Alberto Fujimori (Pérou) qui ont fait la prison. Même si ces deux avaient été emprisonnés à la suite de décisions de condamnation », rappelle Me Traoré.
L’avocat estime qu’une mise en liberté de Dadis Camara ne comporte aucun risque de se soustraire à la justice après toute la bonne volonté à vouloir donner sa version dans les évènements relatifs aux massacres du 28 septembre 2009.
« Personne ne peut donc soutenir qu’il a cherché à se soustraire à la justice. Il n’a pas été extradé. Il a acheté lui-même son billet d’avion pour regagner Conakry. À titre de comparaison, l’ancien Président du Faso, Blaise Compaoré, a fui son pays pour se réfugier en Côte d’Ivoire dont il a obtenu la nationalité. Tout cela pour échapper à la colère des insurgés de 2014 et surtout à la justice puisqu’un pays n’extrade pas ses nationaux », fait remarquer Me Mohamed Traoré.
Il assure qu’une mise en liberté du capitaine Moussa Dadis Camara ne peut en rien entraver la bonne marche du procès du 28 septembre.
« Il est vrai que la détention provisoire n’a pas pour but d’assurer seulement la représentation de la personne poursuivie. Il y a d’autres motifs qui peuvent justifier une détention provisoire. Mais à ce stade de la procédure, la détention du Capitaine Moussa Dadis Camara ne semble pas être indispensable à la bonne marche de la procédure et à la manifestation de la vérité », indique l’avocat.
Mais ajoute-t-il, «sa détention pourrait avoir un autre objectif, celui de prouver à l’opinion publique que la justice est puissante et indépendante en ce sens qu’elle peut mettre n’importe qui en prison et que nul n’est à l’abri d’une privation de liberté. Ceux qui voient les choses de cette manière pourraient dire ainsi “Si Dadis, ancien chef d’État a été emprisonné, personne d’autre ne pourrait y échapper ».
Dans ce cas, estime Me Traoré, « Cela ne devrait pourtant pas être le but principal de la justice. Le rôle de la justice est de rendre la justice et non de prouver sa puissance par des mesures non nécessaires ».
Aissata Balde